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Instant
Bullshit
5 février 2021
https://666revolutionsparminute.blogspot.com/2021/02/brame-ce-qui-rode.html
Lorsqu’on regarde d’un peu plus près
la discographie de BRAME, on s’aperçoit tout de suite d’une
chose, très importante : jusqu’ici tous les enregistrements du
duo ont été autoproduits. Sans exception. Brame c’est José à la
guitare et Serge à la voix, deux types dans leur coin, plutôt
discrets à vrai dire et qui font leur truc bien à eux. Je me
suis alors rappelé de cette fois où j’avais trouvé dans ma
boite-aux-lettres le CDr d’un groupe dont je ne connaissais
encore rien. Une belle présentation, avec un nom : celui de
Brame. Et un petit mot accompagnant le disque, Tenaille, qui
m’avait tenu en haleine. Ou plutôt qui m’avait mordu jusqu’au
sang, ne lâchant rien. Jusqu’à ce jour de 2013 où La Nuit, Les
Charrues… a débarqué à son tour. Toujours plus loin. Puis ce fut
Basses Terres. Un vrai CD cette fois, avec une présentation
encore plus belle et encore plus attirante. On était déjà en
2015, une sale année pour tout dire. Maintenant j’ai un peu de
mal à faire la part des choses. Entre ce qu’alors je refusais
d’entendre du côté du réel (disons, pour faire simple : celui du
fracas et de la destruction) et ce que j’entendais au delà,
comme à chaque fois que je mettais Basses Terres dans le
lecteur.
Je n’ai pas réécouté Basses Terres ni ses deux prédécesseurs
depuis des années maintenant. Sans doute par peur d’y retrouver
ce que j’ai voulu fuir. Des conversations insensées à n’en plus
finir, des horizons depuis longtemps effondrés, des promesses
non tenues, des existences disparues, des regards éteints, des
mains qui se desserrent (les mains qui se desserrent : voilà le
plus important). Tout en sachant aussi ce qu’il y avait – ce
qu’il y a toujours – dedans : des tranches de vie(s). Bien
saignantes les vies, et puis découpées avec un vieux couteau
tout rouillé. Un vrai travail de sagouin, quelque chose
d’irrécupérable mais dont on ne peut pas se défaire. La violence
de la musique de Brame est souvent, toujours, ainsi.
Insoutenable si on la prend comme telle. Une vraie torture, sans
échappatoire.
Alors que de là surgit aussi toute sa beauté. Au milieu d’un
grand ragout de tripes faisandées. Des lambeaux de chairs et
d’existences assaisonnés d’une sale guitare – la seule que je
connaisse comme ça. Une musique qui en quelques notes brûlantes
et vibrantes réussit à associer blues des cavernes, paysages
rocheux, vieilles voies ferrées parcourues par des trains
fantômes, bêtes sauvages affamées, crépuscules orageux, plaines
désertiques, refuges de fortune, gémissements de proies aux
abois, marches solitaires, rivières torrentielles. Peu importe
l’ordre.
Ce qui rôde est le quatrième album de Brame. Je pourrais (je
vais) dire que c’est le plus beau parce que pour la première
fois c’est un vinyle, bien épais et bien dense, dans une
pochette en gros carton qui l’est tout autant. Sans oublier les
inserts sérigraphiés, un autocollant. C’est un objet. (Sans
code-barres, sans aucune référence, sans dépôt de droits
d’auteurs ni logo régional de subventions culturelles.) Mais je
vais dire que c’est le plus beau surtout à cause de la musique
qu’il contient. Celle que je n’avais pas oubliée. La guitare qui
remue la boue et convoque le vent. Les battements minéraux.
L’harmonica au loin. Les hurlements de vie. Et la paix qu’il
ramène avec lui, la sérénité presque, une fois que l’on a
compris et senti que la violence de cette musique n’en est pas
réellement une, que c’est plutôt comme un monde qui s’ouvre et
que s’ouvrir comme ça et bien ça peut faire mal. Je suis heureux
de savoir que tu fais encore partie du monde des vivants. Et je
suis heureux d’en faire encore partie moi aussi.
Hazam
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Satan Owes Us Money
21 Décembre
2020
https://satanowesusmoney.blogspot.com/2020/12/brame-ce-qui-rode.html
Il est tentant, comme chaque fois qu'on a une certaine
fréquentation de ses auteurs, de définir une musique par le
panthéon que vénèrent ses auteurs.
Brame, encore et toujours comme veut l'usage pour leurs pareils,
joue le blues, le creuse, le burine, le sculpte sans fin ; et
dans leur blues, il n'est pas trop difficile, à qui est pourvu
d'un rien d'imagination, d'entendre Unsane et
GodfleshTechnoAnimal ; et, ce qui est plus important que des
influences, le point où ils se rejoignent.
Car à l'altitude où les courants ascendants sur la
campagne assommée emportent le vol de Brame, tout ce beau
monde se gazéifie, et s'unit en lentes, méditatives,
tournantes planeries de rapace : toujours prêt à fondre
soudain et déchirer la chair d'un bec aigu et d'un hurlement
douloureux - mais toujours prêt à l'attendre longtemps, ce
moment ; très longtemps : jusqu'à cesser d'attendre, perdre
de vue l'idée de la fin de l'attente, l'idée de tout but.
L'essentiel, l'unique réalité attestée et certifiée, étant
la conscience, et en l'occurrence son ascension, dégagée de
toute pensée, dans le ciel brûlé, dans la rêverie brute,
bestiale ; telle ce blues acéré et atavique à la fois, loin
pour sûr du plancher des vaches où Basses
Terres avec des hurlements de bête
arrachait chaque pas à la gadoue collante, dans une
sensualité guère plus certaine - mais moins gazeuse, de
toute évidence : ce ne sont pas uniquement les essences
Godflesh et Unsane, qui sont ici devenues hautement
volatiles ; mais celle de Brame, tout simplement, qui
spirale vers le haut, s'affutant et s'élimant en égales
mesures, jusqu'à se fondre avec l'étain chauffé au soleil de
ce ciel muet ; loin également sont les dures ferrailles et
rouages des machines de travail (étymologie, j'écris ton
nom), dans la grange de La Nuit les
Charrues..., où l'on s'affairait à l'établi, toujours
plus tard, dévoré par l'ouvrage, les yeux écarquillés,
vociférant comme une bête de somme hallucinée, un bagnard
énamouré de son labeur, dans le fluide enchaînement de
morceaux tous sous la lumière blême d'une jaquette comme
toujours laconiquement percutant dans le mille... Loin
encore la limpidité désaltérante et naturelle de Tenailles.
On est au cœur du bois, où les essences de To
Bring You my Love peuvent commencer à se
humer, oui M'sieur. Du hautement volatil qu'vous avez dit,
et ben vous en aurez, à en décaper les naseaux. N'avez rien
contre les copeaux, non ? La chaise est juste derrière vous
- la tête risque eud'tourner un peu, et la carcasse dev'nir
un peu toute molle comme une chiffe, quand l'esprit va
s'envoler d'un coup avec les rapaces, contempler les hommes
de peine tout pareils que des rats, depuis là-haut.
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New NOISE
n°56 février 2021
 

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Perte et Fracas
4 Janvier 2021
http://perteetfracas.org/zine/kros2021/kros_b/brame_ce_qui_rode.htm
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Ce qui rôde, c’est l’inconnu, c’est ce qu’on ne nomme pas, ça ronge
la nuit, une sensation inexpliquée qui hante constamment, les
lendemains qui filent la trouille, les démons intérieurs obsédants,
les bêtesgrouillantes à l’extérieur n’attendant qu’une seule erreur,
c’est le brouillard qui protège la proie du chasseur.
Brame, le retour. Cinq ans de silence brisé par un quatrième album,
le premier en vinyle à la pochette en carton brut sérigraphié qui
frotte la peau et plante le décor comme des échardes. Ce qui rôde,
cette drôle de musique d’un duo quelque part en France, continuité
du cri engendré par Basses
Terres qui
était lui-même l’écho tourmenté d’un bramement primaire commencé il
y a fort longtemps et répété depuis inlassablement comme si Brame
était seul au monde et que rien ne pouvait les faire dévier de cette
trajectoire absolue et vitale. Une immersion qui rime avec
désolation, aller toujours plus profond dans la torsion avec
l’angoisse comme seul horizon.
Brame ne joue pas de la guitare, il la malaxe, lui arrache bien des
malheurs qui prend le visage du blues que le duo remet une nouvelle
fois sur le billot. Une interprétation personnelle avec des cailloux
foulés et un tamis pour base rythmique, des tiges frottés pour
enflammer les longues et lancinantes processions ardentes, des
larsens pour rajouter de l’huile sur le feu, une complainte venant
du fin fond d’un gosier d’une bête blessée, un harmonica pour
apaiser les douleurs ou sonner le glas et ces guitares, épaisses,
chaleureuses, rocailleuses, brillantes dans le noir et essentielles
qui montrent la route et racontent des histoires à dormir debout et
de gueules de bois monstrueuses.
Cinq titres unis comme les doigts d’une main que vous avez tout le
temps de voir venir dans la tronche que Brame vous pétrit avec une
lenteur assassine tout en vous obligeant à rester continuellement
sur le qui vive. De longs accords glissant sur des douleurs
récurrentes, un sens impitoyable du drame, des déflagrations
souterraines remontant le long de la colonne vertébrale et agitant
tout le squelette. Pour le faire pleurer, hurler, le laisser
sidérer.
Brame peaufine à chaque sortie son art tel un noble ouvrier
remettant son ouvrage jusqu’à lui trouver son éclat idéal. Et aussi
sombre soit-il, l’éclat unique de Ce
Qui Rôde illumine
de plusieurs degrés supplémentaires la face d’un groupe rare
arrivant toujours à vous surprendre malgré un procédé bien implanté
et n’éprouvant aucune difficulté à vous embarquer dans leur
magnétique et étrange univers.
SKX
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STNT
1e Mai 2021
https://stnt.org/content/brame-ce-qui-rode-autoproduction-2020
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Je
les ai vu en concert ces BRAME, au Ainu Fest, en 2013, le
AINUFEST 3 (RIP Manu) à MONTAIGU, c'était en début d'après
midi, le lendemain du vendredi si tu vois ce que je veux
dire. Les yeux de certains s'ouvraient tout juste, d'autres
ne s'étaient pas fermés, il faisait beau, je me rappelle de
gravier parterre, d'une moiteur dans l'atmosphère et cette
sorte de chaleur d'après midi de fin d'été, je ne sais plus
vraiment. Serge, l'un des deux BRAME me disait qu'il n'avait
pas un grand souvenir de ce concert, je comprends, pas
évident d'être programmé dehors sous un barnum, à la punk à
15h l'apres-midi. Je me rappelle de longueur, d'une certaine
nonchalance, eux qui doivent jouer dans la nuit, dans
l'ombre, ils étaient en pleine lumière, éclairés comme des
vampires. BRAME c'est José et Serge, point barre. Un cajon
pour le beat, une guitare puissante qui discute avec un
animal imaginaire à la crinière éclatante, le tout entremêlé
de différents outils annexes du genre tiges, tamis etc pour
faire avancer l'animal vers des chemins inconnus (de
préférence). Car c'est l'aventure qui interesse ces deux là,
les incantations et les brames sont censés marquer leur
territoire, le lieu déniché est un endroit retiré où le
blues inquiétant te tourne autour autant que la trans du
rythme qui t'emporte dans une danse chamanique.
Entrelacements, danse magnétique, la bête te tourne autour,
oui c'est trop tard, tu viens de te rendre compte que tu
t'es déjà fait piqué, tu sens une main dans le cou, tu
entres dans la danse, tes sens te lâchent tandis que la
puissante distorsion vient t'empaler dans le dos. Tu crois
que tu es mort mais non, tu t'es juste fait embarquer dans
leur univers rude et rugueux, un univers très personnel avec
un quelque chose d'ancestral dedans, une plongée dans la
foret en pleine nuit, un tour dans la vie de quelqu'un
d'autre, bref, BRAME réussit simplement en 5 titres et 40
minutes à ouvrir en toi des portes inconnues.
Valery John Klebar
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Obsküre
25 Janvier 2021
https://www.obskure.com/brame-ce-qui-rode-2020.html
Retour de Brame avec un cinq titres
dépouillé d'une durée de quarante minutes. Cette fois-ci, ce n'est
pas la bande sonore illustrant un film comme c'était le cas avec Le
Manoir De La Peur et
comme ils le ferontpour Häxan
- La Sorcellerie À Travers Les Âges.
Il y a bien un clip pour "Drailles" et on peut s'appuyer dessus pour
dire ce qu'est Brame. Du noir et blanc, unesorte de palissade ou de
mur en palettes, marquée par les emplacements du métal martelé. Des
outils agricoles posés contre ce support. Des chaînes et un coin de
ciel. Quelques herbes qui ploient sous le vent. Pas d'humain. Les
images se répètent, le montage est serré et les gros plans dominent.
Progressivement, lorsque les cris fusent, des écritures déchirées se
superposent et rayent les visuels. De temps à autre, un mot est
lisible, mais subrepticement. La musique, elle, est moins syncopée.
Elle racle et déchire toujours, en s'appuyant sur un fond qui est
celui du blues. Même si la campagne et les animaux sont privilégiés,
on pense forcément à une décharge rurale tant cette musique sent la
rouille. J'apprécie particulièrement la façon dont les cris sont
lancés : c'est non-humain, sans tomber dans le bestial des genres
death, black ou screamo. Les variations sont multiples, allant de la
colère aux appels, des prières aux lamentations. On a un peu de la
façon d'Unsane pour cette idée de société malade. Mais la force de
Brame c'est de donner corps à cette ruralité de rednecks méchants.
On sent à la fois une Amérique en déclin et son parallèle français
avec des coins reculés et abandonnés de tous (un peu à l'instar du
livre en réalisme fantastique de Maurice Pons, Les
Saisons,
ou encore du film Calvaire de
Fabrice du Welz).
Les titres donnés sont révélateurs, crus
et angoissants ; on peut y lire une référence au livre Demain
Les Chiens de
Clifford D. Simak, exposant la lente dérive de l'Humanité et sa
disparition au profit des chiens qui ont appris à parler. Même "Le
Dehors" porte sa charge de danger (le klaxon bloqué ou bien la corne
qui lance son appel dans le vide au début), comme s'il fallait
rester pour toujours dans cette "Vallée borgne", en affronter "Les
Chiens" (qui deviendront des loups, avant d'en passer par les coups)
pour accéder au "Plateau" en empruntant la "Draille" (le chemin de
transhumance). Les riffs éraillés à la basse ou à la guitare sont
calés sur une batterie percussive minimale (au son sec, comme
doublé). Des notes en larsens lacèrent la mélodie de base,
répétitive, incantatoire, qui utilise également une sorte de violon
en mode scie (à la John Cale) sur "Les Chiens". C'est une musique
faussement planante, une sorte de mélopée ritualisée mais sans
gourou. Elle sonne solitaire alors même qu'elle est produite par le
nombre : même si c'est bien un groupe qu'on entend, qui joue
ensemble et construit sa narration (le démarrage soigné en note à
note de "Vallée borgne"), le résultat est lié à l'aliénation aux
autres, au repli. La fête alcoolisée ou démente qui se trame isole
ses participants. Ce n'est pas une communication, mais une
excommunication forcée.
La violence inhérente à cette musique est
toutefois tempérée par la simplicité des riffs bluesy : on peut
accompagner sans difficulté ces défaillances mentales. Finalement,
ce qui rôde n'est sans doute pas un danger extérieur, mais bien une
maladie qui empoigne chacun de nous si les circonstances l'y
invitent. Pour faire un raccourci factuel, cette musique
illustrerait parfaitement le moment qui précède le passage à l'acte
d'un survivaliste violent et pyromane. Glaçant ?
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Des Cendres à la Cave
13 décembre 2020
https://www.dcalc.fr/brame-ce-qui-rode/
Cinq années séparent Basses
Terres de Ce
Qui Rôde… et le temps n’a aucune prise sur
l’écosystème de Brame.
Le duo est rare, sa musique l’est aussi. Pour rappel, Brame,
unique représentant d’un genre inédit, joue du blues qui s’apparente
à du field recording : tous les bruissements, tous les galops, les
cris d’animaux et autres manifestations de la nature se retrouvant
encapsulées dans sa musique proviennent de leurs instruments (ou de
leurs artefacts). On retrouve sur cette nouvelle captation les
guitares (une folk et une baryton) et les poussières d’harmonica, la
ferraille frottée, les cailloux piétinés, un cajon basse pour les
proto-percussions et quelques borborygmes. Pas d’électronique, pas
d’effets, rien pour pervertir le son, juste de quoi l’amplifier.
C’est primitif (ce qui ne veut pas dire que la complexité est
proscrite), c’est tribal (ce qui ne veut pas dire que ce n’est pas
sophistiqué), c’est atavique (si les peintures pariétales pouvaient
jouer, ça ressemblerait sûrement à ça) et surtout, sans le moindre
doute, si je m’en tiens aux réactions de mon épiderme parcouru de
soubresauts à chaque fois que le disque rejoint la feutrine, c’est
beau.
Alors, c’est vrai, le beau c’est subjectif. Pourtant, Ce
Qui Rôde… est authentiquement beau. De son
habillage (on en reparle plus loin) à la musique qu’il renferme, le
truc déclenche des vibrations qui ne trompent pas et que l’on ne
maîtrise pas.
Toujours l’impression d’avoir branché les enceintes directement dans
l’argile et d’entendre la mécanique enfouie sous la sphaigne,
l’écosystème qui chante, la faune (où l’humain est considéré comme
un animal parmi les autres) et la flore qui se fracassent,
l’inconscient capté sur le vif. C’est une forme de blues terreux,
glaiseux, gorgé d’eau de pluie et de cristaux de glace, une
émanation des forces invisibles qui courent sous nos pieds. Tout
cela explique le caractère primitif de Brame ou
permet en tout cas d’un tout petit peu cerner sur quoi il s’appuie.
D’emblée, Drailles capture
les neurones : puissant, percussif, des riffs tournoyants comme « les
vautours par-delà les drailles », la voix âpre,
rugueuse, dont on ne distingue pas tous les mots. C’est sec et dur
et drastiquement sombre mais surtout complètement prenant. On dira
exactement la même chose de Vallée
Borgne d’où émergent quelques trilles d’harmonica
qui ne rassurent pas. C’est comme du Peckinpah mis
en musique : un plan séquence au ralenti dans la boîte crânienne, un
road movie sur les chemins de terre – les drailles –
avec la violence tapie à chaque embranchements. Plateau calme
le jeu. Moins écorché, plus apaisé, moins disloqué, il garde
néanmoins les pieds bien enfouis dans la terre. Voilà pour la face
A.
La B conserve la même minéralité. Les
chiens en ouverture retrouve le long râle, les
lâche par intermittence et chez Brame,
ce sont des loups. Vient ensuite Le
Dehors, le gros morceau de Ce
Qui Rôde… Non seulement par sa longueur
(plus de douze minutes) mais par sa construction tout à la fois
heurtée et mouvante. Les îlots de bruits reliés par des éclats de
slide, la voix hurlant et déchiquetant, prévenant que « le
bois de nos portes/ne nous protège pas », avant de devenir
carnassière, « je
griffe et je hurle/mes dents creusent dedans » et
tout autour, c’est exactement pareil : le morceau attaque. Cinq
titres seulement, plus ou moins identiques et franchement, peu
importe parce que ça ne s’entend pas. Les morceaux de Brame sont
tout entiers inscrits dans le temps présent, chaque seconde effaçant
consciencieusement toutes les précédentes. À leur écoute, on reste
sur le qui-vive et on attend que la tension qui les irrigue nous
touche et nous agisse, ce qu’elle fait systématiquement.
Et une nouvelle fois, ce bloc de griffes est cerné d’un artwork à
tomber. Carton brut et sérigraphie dont on attend, quand on les
ouvre pour la première fois, qu’ils dévoilent un disque en granit ou
en bois. Mais non, c’est un beau vinyle noir et ça correspond tout
aussi bien à ce qu’on y entend. Brame a
pris son temps, c’est vrai mais peu importe, Ce
Qui Rôde… l’efface et donne l’impression
d’avoir toujours été là, depuis bien plus longtemps que nous.
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PERTES ET FRACAS
14 mars 2016
http://www.perteetfracas.org/zine/kros2016/kros_b/brame_basses_terres.htm
Brame et retiens la nuit. Nouveau cri de bête sous la lune déclinante.Basses
Terres succède à La
Nuit, Les Charrues. Musique de rues sordides, de ruines, de
pays oubliés par les puissances divines. Basses Terres laboure
un sillon plus épais et envahissant que jamais, remplissant l'espace
d'une couche supplémentaire de charbon. Le son incomparable de la
Gretsch baryton, l'harmonica, la complainte déchirante du condamné qui
sait que tout est joué d'avance mais aussi les cailloux piétinés, les
granulateurs, les tôles et tout l'attirail du sculpteur de sonorités, le
duo naviguant du coté de Bordeaux continue de déclamer son blues
scélérat et âpre à s'en pourfendre le cœur.
Une instrumentation et une approche singulières, ça passe ou ça lasse.
On pourrait donc adresser à Basses Terres le même reproche fait
au précédent album. L'impression d'écouter cinq fois le même morceau
pour un album qui en plus ressemble trop à son prédécesseur. Mais Brame,
c'est avant tout une histoire d'ambiance. Une putain d'ambiance à couper
au couteau. Un parti pris radical qui joue justement sur une outrancière
répétition et des morceaux au très long cours pour marquer son
territoire, vous enfoncer plus bas que terre, au croisement des méandres
d'un delta de Louisiane où rodes les ombres d'un True Detective et d'un
puits de mine à l'abandon au fin fond de la Lorraine, un esthétisme
aride et absolu qui interpelle et ne laisse pas insensible. Jusqu'à se
cogner contre les murs.
Alors pour peu que vous soyez d'humeur et de préférence très sombre, Basses
Terres peut se révéler dramatiquement beau et dur. Une pulsation
interne, une sourde et profonde tension, un cercle infernal tournoyant
dans le ciel rouge pendant que les corps tombent autour de vous. Seuls Étrangé (avec
un certain Christophe invité à la guitare) et Friches,
prolongement de Fourches (avec le soutien du Ministère de
l'Agriculture et de l'Industrie) se présentent plus apaisés et propices
à l'apparition de fantômes ou la rêverie contemplative d'un monde qui se
meurt dans une douleur silencieuse.
Brame, c'est exténuant, c'est à se flinguer, ça sera pas tous les jours
mais allez savoir pourquoi, on en redemande à chaque fois.
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SKX
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Le Zèbre / BRING THE NOISE
8 mai 2016
http://lezebre.info/bring-the-noize-15/
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Pas de labels pour Brame (de Toulouse) qui a publié son troisième album
Basses Terres en totale autoproduction, tout comme ces deux
prédécesseurs, Tenaille en 2009 et La Nuit, Les Charrues en 2013. Et au
passage l’objet (un CD) est vraiment très beau avec sa pochette
sérigraphiée en carton et son insert soigné. Brame est un groupe qui possède sa propre esthétique. Ils ne sont que
deux : l’un joue principalement de la guitare baryton et l’autre chante
(beugle), joue de l’harmonica et de quelques rares percussions. Et c’est sublime : Basses Terres est envahi par un brouillard tellement
étrange et qui semble parfaitement coller au blues des origines, pour
une musique dépouillée, moite, lentement fulgurante mais aussi minimale
et, finalement, d’une obscurité aveuglante… la beauté incandescente de
ce disque dégage un tel parfum de liberté, la liberté dans l’hébétude et
l’abandon. Sauf que cette liberté saigne et qu’elle peut faire mal… Basses Terres ressemble étrangement à un exorcisme. Mais un exorcisme
incomplet, comme si le mal et son remède avait une seule et unique
source, comme s’il était impossible de choisir entre les deux options,
comme si pour guérir de son mal il fallait à nouveau choisir de se
frotter à lui, sans fin. Basses Terres est à la fois le disque que
j’écoute le soir en m’endormant et le disque que j’écoute la nuit
lorsque je n’arrive pas à dormir.
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Hazam
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GUTS OF DARKNESS
dimanche 10 janvier 2017
http://www.gutsofdarkness.com/god/objet.php?objet=18567
À chaque fois que j'écoute un album, je
visualise d'abord un endroit bien précis dans lequel je suis allé.
Jamais un lieu que j'invente à partir d'autre lieux, jamais celui d'un
film. Un lieu que je revois, limpide. Sans pouvoir lutter contre
l'apparition subite de ce cadre mental, sans pouvoir dé-lier le disque
de ce lieu qu'une partie molle de mon bulbe à décrété greffée à jamais à
une musique. C'est d'une toute autre profondeur subjective que les décors dressés
dans les chroniques, qui ne valent souvent que pour mieux allécher le
lecteur. Ce n'est pas une métaphore : c'est une association son-lieu
dont le ressort m'échappe. Le décor qui me vient à l'écoute d'un disque
est tout bêtement celui d'un endroit banal le plus souvent, et presque
aussi souvent sans lien direct avec l'ambiance de la musique, du moins
en apparence. Ce peut être une portion de route traversée pour aller au
boulot, la pièce à vivre d'une connaissance, l'école primaire, un centre
commercial... Un endroit dans lequel je suis passé récemment ou il y a
longtemps ; une fois ou mille. Presque à chaque découverte musicale un lieu différent (seuls quelques
rares albums ont en commun le même). Et quand je ressors tel album, des
mois ou même des années après, je reviens dans tel lieu, le même lieu
que la toute première fois - impossible de m'en extraire, ils sont
siamoisés. Est-ce que parfois je ne parle pas d'un disque dans le but de sortir de
son lieu ? Et cela afin d'accéder à un lieu que je partagerais avec d'autres
auditeurs pour m'extraire de ce lieu-prison... ? Et puis merde à la fin : tout ça c'est très pénible à cerner, et
probablement d'une banalité à pleurer qu'est-ce que j'en sais, c'est
peut-être le lot de tout mélomane - synesthésie, je crois - et je ne
devrais pas en parler.
Seulement Brame, groupe dont je n'attendais
rien qu'une écoute-labeur, m'y a fait penser pour la première fois à ce
point en 2013, et j'ai tu la vision, pour en fabriquer une moins intime.
Car avec La Nuit, Les Charrues, ce fût la
première fois que je m'imaginais chez mes arrière-grands-parents à
l'écoute d'un disque. J'ai donc menti en disant que je ne pensais pas à
l'agriculture. Car c'était bien le cas : du plus profond du bulbe je ne
voyais que cette ferme. Je les ai peu connus ces vieux machins, mais
Brame me renvoie à leur propriété plate et moche, et ce dès ce premier
morceau avec son grincement blues obsédant qui creuse une tranchée
vilaine. Des cul-terreux comme pléthore, adolescents quand les bourrins
n'étaient par encore des Deutz. J'ai senti l'odeur plumaillasse du
poulailler, ouï le cri abominable du porc qu'on mène à l'égorgeoir, été
pincé au mollet par le jar patibulaire. J'étais mal à l'aise là-bas, et
en même temps je ne voulais pas en partir. Comme si je traversais une
carte du passé au présent...
Et Brame sort un troisième album, peut-être
son plus sinistre, qui me place cette fois hors de la demeure. Je suis
dans la cour. Il fait nuit. Le poêle est froid à l'intérieur, je crois.
Le billot a fini de boire le sang des bêtes. Les aïeux ne sont plus là ;
la momie chétive de Louis-Ferdinand qui pissait sur le pas de porte ; ce
petit corps foutu prostré de vieille à qui on avait abandonné les jouets
les plus basiques des enfants pour occuper ses mains tremblantes :
disparus. Les animaux aussi. Des ombres furtives, mais pas sûr. Du bruit
dehors. Entre les arbres. Un sale bruit. Qui agonise dans le brouillard
sec ? Est-ce un maquisard énucléé à la petite cuillère ? Le simplet des
voisins qui vitupère après avoir asséché sa dernière bouteille de goutte
? L'horloge est un pouls, plus que jamais. Sur ce mécanisme de pendule
la guitare geint, se tortille.
Il n'y a pas grand chose dans Brame : le
rythme ouvrier résigné, les ronces aux cordes, la voix flanquée
là-dedans comme une écharde coriace, une écharde vivante. Cela suffit.
L'ampli crache presque non-stop sa limaille. Et cela suffit. Qui espère
reste loin d'ici. Ce n'est pas grand chose... on sent qu'il manque
quelque chose... mais on serait en peine de dire quoi. Brame joue avec
peu d'outils mais en purge une matière brute. Les passages southern sont
presque disparu, le seul moment qui évoque les terres de l'Ouest serait
à la rigueur la troisième piste... cette Amérique a la couleur de
l'établi ; c'est la France, la terre des brameurs éternels.
C'est un groove d'agonie qui vous dresse un
Malevil de poche avec la manière sans manières des vrais artisans.
L'indus de Brame - ou son rock - ou son blues - tire un maximum parti
des moyens limités, comme on fabrique les douk-douk. Le
stzzzzzzzzzzzzzzzzzrict minimum, pour le maximum. De sécheresse,
d'austérité, de matière nue. Comme une astringence qui nous frustrerait
presque d'y ajouter du sucre, sans que jamais on ne se persuade que ce
ne serait autre chose que les dénaturer. Non, aucun sucre dans cette
musique. Aucune eau.
Aucun feu.
Quelque chose d'archaïque, qui reste prostré ;
une musique de taupe humaine en état permanent de naissance, accouchée
par la terre, et réagissant, sans plus de théâtre qu'un nourrisson
fraîchement chié au monde, à toute la violence des sensations du dehors,
de cet air immense tout autour d'elle comme un néant froid qui n'a rien
de commun avec le confort de son humus chaud. Un truc de misanthrope à
peine conscient de ce qu'il est, du monde qui l'entoure, seulement
conscient qu'il peut bramer, avec l'écho pour seule consolation.
Pourquoi se compliquer la tâche à les décrire dans le fond tant leur nom
reflète justement à la perfection ce qui les sort à chaque fois du
silence : Brame. Brut de chez brut, outre-instinctif. Le râle du né à
jamais. Famélique, aveugle, incoercible.
Un boucan comme terreau à une douleur concise,
précise. Et ce vent qui souffle jusque dans votre charpente à travers
toutes vos briques de carne, sur le mornissime final... vous
l'entendrez, comme je l'entends - et vous saisirez d'un casque pour
ressentir à fleur de tempe toutes ces choses pointues qu'il charrie dans
son sillage. Oui, cela laisse sur sa faim... sans qu'on ne veuille
croquer le moindre quignon de plus. Basses Terres est un album sec,
rêche, aussi peu amical qu'inviteur. Avec Brame dès la pochette en
carton-bois, dès les intitulés laconiques, aucune place pour le
racolage. Que vous l'écoutiez ou non, cette rouille de musique est
taillée pour les hivers rudes. Et c'est ce lieu ancien dans ma tête, qui
au fil des écoutes s'est dilaté pour ne se réduire à plus rien. Qu'un
brame.
-
Raven
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NEW NOISE MAG
Janvier-Février 2016
-

BLUES DES TERROIRS
Troisième disque du
duo touloso-montalbanais, Basses Terres n’a point pour horizon la
Guadeloupe ensoleillée et l’electro zouk débridée. Toujours composé de
José (Gretsch baryton, granulateurs, cailloux piétinés, cajon basse) et
Serge (voix, harmonica, tamis, cymbale, tôles), Brâme chante le blues
des estuaires et des embouchures, l’âpre retour à l’origine, le groin
dans l’humus, une terre meuble et noire, mais dégarnie, gorgée de métaux
lourds. Un blues ancré dans la noise et les friches ambient-drone
industrieuses, nocturne et rocailleux, lourd, menaçant et poisseux comme
un écoulement de bile et de sang noir, porté par le grain hargneux de la
guitare dont les zébrures et les glissandos visqueux rappellent la
fameuse BO de Dead Man by Neil Young. « Sanglier », c’est le grenier
médocain mis en musique, une battue en solitaire, au couteau ; la
Garonne pour Mississippi (« Et si tu peux te perdre du côté du fleuve Il
te calmera jusqu'à ce que tu ne puisses plus respirer », comme disait
l'autre). Derrière les vagues bluesy et les crépitements noisy
retentissent les mugissements douloureux de Serge. Un titre qui aurait
aussi pu légitimement figurer dans la BO de True Detective, ou celle de
Razorback. La guitare râpeuse souffle sur la braise « Des Feux », se
chargeant en électricité, ne cessant de dodeliner du chapeau, pendant
que l’harmonica glisse sur l’horizon. On pense aussi à Earth évidemment
(« Etrangé »), Across Toundra ou une version lo-fi des Swans pour ce
primitivisme blues/noise/drone laissant la part belle à la transe
sonique, à l’immensité des espaces infinis, à l’abandon face aux
éléments, malgré les salissures d’un ciel voilé. Le couple « Fourches »
(Matthew Bower dans ses heures les plus bluesy) et « Friches » (un vol
d’étourneaux drone) chevauchent vers des zones plus arides, une lande
décimée par un terrible vent sec, avant de s’en retourner vers le
fleuve, chargé de limon boueux, pour embarquer sur le frêle esquif de
Charon jusqu'au terminus de la gare de triage, lambeau de civilisation
planté au milieu de nulle part, sur un languissant drone ferroviaire.
Pas de reprise cette fois-ci (même pas de nouvelle version de « When The
Levee Breaks » de Kansas Joe McCoy et Memphis Minnie, déjà repris par
deux fois par le passé), mais un album plus varié que les précédents,
bonifié par une production plus chaude et moins broussailleuse, misant
sur la proximité et l’absence d’artifice. Le tout emballé dans un
digipack cartonné et sérigraphié, comme le beau booklet looké « coq au
sang ». L’amour de la production artisanale partagée.
T.SKIDZ 8/10
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SLOW END
2 mars 2016
http://www.slowend.com/chroniques/?d=2776
Alors bon, le nouvel
album de Brame. On va faire de mémoire, parce que Brame
fait partie de ces groupes que j'adore, mais - ou plutôt
: et, voire : donc - que je n'écoute qu'une fois toutes
les morts d'évêque. On va pas passer la nuit à se
justifier, mais c'est une histoire d'expérience
viscérale, élémentaire, originelle, bref, vous avez déjà
pigé ou bien vous ne pigerez pas.
Donc, de mémoire des précédents, on n'avait jamais
entendu Brame aussi... orthodoxe, presque rock ; aussi
clairement vertébré, articulé, rythmé - ils n'ont pas
embauché un batteur, non, pas d'affolement, et ce n'est
pas avec Basses Terres qu'on découvrira soudain chez eux
une puissante proportion de blues, qu'on leur connaît
depuis l'origine, mais... On a le sentiment de
rencontrer un Brame qui s'est, sinon rasé, du moins
passé un coup de tondeuse ou ne serait-ce que les lames
rustres de ciseaux, sur le chaume séché des joues, et
éclairci de quelques glaires une gorge encombrée, pour
essayer une fois de nous adresser la parole dans notre
langue énervée de gens modernes et incisifs... Vous avez
saisi le topo là aussi et je ne vais pas ménager le
suspens des plombes : rapidement le ton et le timbre
s'épaississent, se brouillent, de cette chose plus
profonde que l'énervement, et bon sang noir ne sachant
mentir, le tord-boyaux se met à faire remonter la
caillasse qui reposait au fond du gosier ainsi que sur
le lit de la rivière dont les eaux montent et se
troublent, et en fait d'incisif le rural vous donne à
nouveau deux-trois choses à ruminer ; remonter, ruminer,
c'est bien le cas de le dire, c'est bientôt ce qui
arrive et submerge un disque qui paraissait vouloir
commencer là où les autres disques de Brame s'achèvent,
sur ce sursaut d'énergie rebelle, cet effort rythmé - et
du reste c'est bien ce qu'il fait, d'une certaine
manière, pour nous découvrir ce qu'il y a après : ô
surprise, du blues. Et pour une fois, on ne va rien
invoquer d'autre en fait de groupes, car pour cette fois
réellement ce serait de la mauvaise foi et projeter sur
la musique tout ce que l'on sait de ses auteurs et de
leurs affinités. Basses Terres mérite simplement qu'on
le qualifie de musique blues, à la fois par le fait
profondément intriqué à la tradition, et non moins dans
le même mouvement viscéralement braméen ; non pas que
pour autant cela désigne les disques précédents comme
moins bons, ou moins personnels ; mais Basses Terres est
cette chose brute et émondée, non pas de toute syntaxe
ou articulation, mais de toute divagation, distraction
de son rude et direct propos, de toute rêverie, car
c'était pour ça qu'il s'était rasé, le bougre, et
s'était raclé la gorge : pour nous accrocher sur les
oreilles façon guirlande de boyaux deux-trois vérités
bien frappées, une paire de grosses claques sur les
oreilles comme cela réveille, pour éviter tout
malentendu, les yeux vissés dans les yeux
Avant de conclure, narquois, sur un glas rafraîchissant
comme un bon coup de blanc sur tout ça.
Basses Terres en trois
mots : sanguin, douloureux,
corrosif
Gulo Gulo
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Des Cendres à la Cave
7 décembre 2015
http://www.dcalc.fr/
Basses Terres débute par des éclats de voix accompagnés d’une guitare
baryton qui marque la pulsation puis s’en va tracer des méandres
glaiseux une fois expulsée des enceintes. C’est bizarrement solaire mais
également très pâle. Plus proche de l’aube que du crépuscule, lorsque le
soleil blafard se cache encore derrière le brouillard sans vouloir
succéder à la nuit. La musique de Brame sent l’humus et les fougères,
les ronces et la terre grasse gorgée d’eau, elle porte en elle les
grognements habituellement étouffés par la canopée, ceux qui foutent la
frousse et rappellent que ça grouille là-dessous. Comme un manifeste, le
premier titre s’appelle Sanglier et ses huit minutes lui correspondent
tout à fait. Dans toute sa majesté, c’est bien à l’animal que le morceau
nous ramène. On parcourt avec lui les sentiers, on traverse les murs
végétaux et on essaie de survivre à la nuit. Brame a un petit quelque
chose qui rappelle fortement Earth, un truc indéfinissable qui fait que
lorsqu’on l’écoute, on part en errance avec lui. Mais là où Earth
préfère le désert et l’éclat minéral magnifié par le soleil, Brame opte
pour la forêt et les friches organiques. Basses Terres fait naître un
road movie – bucolique certes mais surtout inquiétant – dans le crâne,
un road movie qui n’aurait que faire des routes. Il faut dire que le duo
n’a pas son pareil pour communiquer ce qu’il a dans le ventre.
Extrêmement rugueux, il se fout des fioritures. Pourtant, rien n’est
approximatif dans sa musique. Elle est simplement brute et rejette bien
loin l’embellissement. Mélange de noise sèche et de drone pelé, de
poussières de blues bien singulier, Brame expulse une mixture que l’on
pourrait qualifier de tribale, voire de primitive, en prise directe avec
le magma qui court sous les pieds. La voix n’est qu’un râle, un cri, un
grognement dont s’échappent quelques mots de temps en temps. Elle ne
dépasse jamais le pré-verbal et pourtant, on comprend tout à fait ce
qu’elle communique.
Même chose du côté des instruments, difficile d’identifier les mélodies,
les ponts et tous ces trucs qui font habituellement qu’un morceau paraît
construit. À la place, des riffs distordus, répétés ce qu’il faut pour
qu’on s’y enferme, des proto-percussions, des frottements, des bruits et
parfois un harmonica lointain qui danse avec les volutes de slide. La
musique de Brame est primale et s’adresse donc aux tripes. Attention,
elle n’a rien de bas du front, elle évacue simplement toute forme de
sentiments pour viser les émotions. Les plus brutes, celles qui prennent
naissance au creux du ventre et court-circuitent le cortex. Elle touche
donc en profondeur, elle s’insinue et on finit par s’y perdre. Les
pièces se fondent les unes dans les autres, elles semblent ne jamais
s’arrêter quand l’ensemble frise à peine les quarante minutes. Quand la
fin arrive, elle est abrupte. Bardé d’un attirail de matériaux destinés
à rendre sa musique plus vibrante encore – cailloux piétinés, tamis,
cymbale frottée, tôles – le duo donne l’impression d’à peine contenir ce
qui sort de ses doigts. Comme s’il était le média d’un flot indomptable
qui ne demande qu’à sortir : Sanglier et ses cris, Des Feux et ses
zébrures de slide corrosives mêlées d’harmonica fantomatique, Etrangé
qui suit exactement le même chemin, Fourches et ses neuf minutes
proto-industrielles superbement mal dégrossies, Friches et sa lente
agonie. Tous dessinent les contours d’un pavé d’émotions brutes,
palpitant et hypnotique. Les choses étaient déjà bien posées lors du
précédent, elles ne s’arrangent pas avec Basses Terres et ça tombe bien,
ce n’est surtout pas ce qu’on leur demande. Le son est toujours aussi
crade et envoûtant, la Gretsch baryton continue à gronder au même titre
que la voix, les contours demeurent bien noirs et écorchés, ils peinent
à contenir les lames de fond grondantes qui pullulent de gerbes de vie.
C’est finalement ce que l’on retiendra en premier lieu de cet objet
sonore : ce que l’on trouve au creux des sillons, c’est la boue et c’est
la vie. Disque-écosystème qui donne l’impression d’avoir branché la
platine directement sur les frondaisons, on y entend le son de la faune
et de la flore passé par le prisme de l’humain. Superbement emballé sous
une pochette en carton sérigraphiée, l’objet provoque de sacrés remous
et fait vibrer des zones tellement enfouies et fondamentales que l’on
avait fini par les oublier.
Leoluce
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Obsküre Magazine n°27
Janvier- février 2016
Cinq titres et presque quarante
minutes de sonorités déchirantes, blues industriel et rock primitif. Au
sujet du disque précédent (le très bon 'La Nuit les Charrues'), je
citais le film 'Razorback'. Depuis le groupe a généré en live une
envoutante bande-son pour le film muet 'Le Manoir de la Peur'.
L'expérience a été profitable si on juge par l'écoute de ce "Basses
Terres". Les mélodies se calent sur des bases rythmiques en boucle et
les paroles se font cris (« Sanglier ») tandis que chacun des titres
s'enchaîne à celui qui le précède par une courte transition plus calme.
Le packaging est une nouvelle fois super soigné, élégant dans le choix
du papier et de ses teintes terreuses / café noir (cf le site vilgato.blogspot.com).
Disque des insomnies et des cérémonies les plus brutales (« Fourches »),
union d'instruments traditionnels et de matériaux rudes (cailloux
piétinés, tôles, tamis...), Brame offre une musique cérémonielle chaude
et violente, insoumise en tout point.
Sylvaïn Nicolino 85 %
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Casbah Records
janvier 2016
https://casbah-records.com/webzine/brame
Le brouillard duquel émergent les squelettes métalliques des pylônes
électriques, silhouettes fantomatiques accentuant la morosité des
arbres nus, désespérés d’attendre le retour du soleil source de
toute vie.
Les bois, sombres intercalaires entre les parcelles agricoles à la
géométrique rigueur, desquels s’envolent des nuées d’oiseaux noirs.
La boue omniprésente jusque sur les routes, apport constant des
tracteurs sillonnant sans cesse les axes du canton, rare
manifestation d’une présence humaine.
Le hangar aux tôles rouillées affrontant stoïquement le vent battant
sans cesse les reliefs des plateaux livrés à l’obsession céréalière.
La verticalité d’un silo, lointaine cathédrale agricole dominant
l’horizon.
Les Hautes Terres.
Le ciel de coton anthracite, appuyant sur les épaules de l’Univers
visible.
L’omniprésence lassante de l’interminable hiver.
Le vol des corbeaux faisant résonner leurs croassements lugubres
dans l’air humide et froid.
Les villages aux maisons mortes et fenêtres noires, aux rares
cheminées fumantes.
Le volet disloqué claquant dans le vent.
Le drapeau tricolore usé, délavé, pendant tristement, mouillé, sur
le monument aux morts dont personne ne se souvient qu’ils aient
vécu.
Les pâtures, rares ilots de verdure entaillées par le ruban noir de
la rivière peinant à drainer les parcelles saturées d’eau stagnante.
Les hérons efflanqués au lourd vol ptérodactyle, planant au-dessus
d’immenses peupliers dévorés par le gui.
L’arbre mort incliné dans la chute figée de sa lente agonie.
Charrue rongée par la rouille, laissée là à pourrir depuis des
décennies, vieux pneus, remorque caduque, amoncellement envahi par
les ronces.
Mousses gorgées d’humidité et lichens baroques vampirisant la
vitalité des arbustes des sombres friches marécageuses. Cloaques
spongieux.
Les Basses Terres.
C’est de tout cela dont nous parle Brame, qui rappelle que non, la
campagne ne (se) vit pas seulement l’été, coquelicots et
rouge-gorge, barbecues et apéros dans le jardin, déjeuner sur
l’herbe et dormeur du val. Brame est l’ultime antidote au bucolique.
Brame nous parle des sangliers, masses sombres, hirsutes et
disgracieuses, pas des chevreuils graciles.
Brame se frotte aux feux, protectrices sources de chaleur contre la
rigueur hivernale. Craquement froissé du papier que l’on chiffonne à
la va-vite, craquement sinistre de la cagette que l’on démembre,
craquement – enfin ! - de l’allumette ; les feux, crépitants remèdes
à l’hostilité humide et froide des extérieurs.
Brame évoque l’étranger au village, celui dont on ne connaît pas la
voiture, celui vers lequel on tourne un œil hostile en se demandant
où dont qu’y « reste ».
Brame manie la fourche, pas le râteau à feuilles.
Enfin, aux forêts de chênes centenaires au sol tapissé de petites
fleurs blanches, Brame préfère les friches, enchevêtrement d’épineux
qui déchirent les vêtements et lacèrent la peau de qui s’y aventure.
Guitare rugueuse à la tessiture de gravier, hurlements, invectives
lancées à la face des divinités du paganisme rural (John Deer et
saint Hubert en tête) : Brame extériorise le désespoir pathétique
d’un hiver éternel. Une noise sobre, aride, calcaire. Rêche.
La musique de Brame, âpre et ardue, peut être vue comme une
métaphore des territoires ruraux, marginaux, à l’écart des facilités
et des tentations vaines, où les haines irréductibles côtoient les
plus belles solidarités, où l’Homme, face aux difficultés
existentielles, trouve matière à méditation. Espaces à l’immobilisme
feint, où pourtant la succession des saisons se fait sentir avec le
plus d’acuité, de la lumière à l’obscurité, de l’obscurité à la
lumière.
NicolasGougnot
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MITHRA TEMPLE
http://mithratemplezine.tumblr.com/post/139866156524/chr%C3%B6nique-brame-basse-terre-2015
février 2016
Vibration ancestrale parée d'un superbe digipack sérigraphié Basse
Terre est le deuxième album de Brame,
un duo qui a la particularité de signer une
expérience auditive principalement à
l’intersection du blues, du noise rock, et de
l’industriel.
Dans ce nouvel opus le groupe nous invite à
errer dans les décors d'un western qui se
déroulerait dans la France périphérique et ses
villages en déshérence, des espaces où il ne
reste plus que les résidus du monde d'autrefois,
et où les hommes de chair et de sang se sont
fait fantômes et ombres furtives…Il s’y
développe, certes, un champ lexical propre à la
ruralité, mais il est loin d’oblitérer le poids
de l'urbanité dans l'atmosphère globale que
dégagent les cinq pistes de Basse
Terre !
Bien plus compact que La nuit,
les charrues..., l'album précédent de Brame, l'auditeur
est happé dans un tourbillon de réminiscences
familières et de territoires inconnus qui
se dessinent devant ses yeux ; la pulsation
animale guide le rythme pour d'inachevées
mélodies sur lesquelles s’étouffe le gémissement
d’une rage primordiale. Basse Terre est
addictif par son intense tellurisme - qui peut
prendre le visage d’un doom “primitif"- mais il
laisse aussi planer des invitations à la
contemplation.
Il semble être la quête de l'Homme, du frère
d'arme, du camarade sur qui l'on peut compter,
mais tout cela n’est-il pas un amas idées venues
d'un autre temps ? Et c'est ainsi que Basse
Terre évoque une inconsolable
blessure à jamais béante d'où suinte une
incroyable relecture brute, lourde et
industrielle du blues nourrie d’un minimalisme
organique et hypnotique. Sincère et intuitif Basse
Terre est un cri du cœur
auquel il est impossible d’être insensible !
Brame : Facebook
Lawofsun.
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THRASHOCORE
mai 2016
http://www.thrashocore.com/…/6648-brame-la-nuit-les-charrue…
Originaire du Sud Ouest de la France, ce duo a su faire son trou à la
sueur de son front et au fil des sorties. En effet, après un premier
album paru en 2009 Brame enchaîne et enfonce le clou avec notamment La
nuit, les charrues... (2013) – dont il est question ici – mais aussi le
dernier-né Basses terres (2015) grâce auquel j'ai pu le découvrir sur le
tard. Et ma première rencontre avec cette entité atypique ne s'est pas
faite non sans mal, délivrant une musique de fin du monde à la fois
aride, brute et lancinante : une plongée douloureuse dans une ruralité
terne, rongée par l'exode et l'urbanisation galopante. Les musiciens
semblent façonner leur univers dans la douleur et de leurs propres
mains, à l'image également des beaux livrets CD en papier cartonné faits
maison ainsi que des artworks très sobres de Serge, renforçant l'aspect
artisanal de l'ensemble et cette impression d'Art Total. Suivant le
sillon tracé par Tenaille, et réalisé une nouvelle fois en
autoproduction, ce second long format offre une vision toujours aussi
grisâtre mais dans une version enrichie et plus rustique.
Une production davantage puissante et lisible qui met en relief les
divers arrangements, un « The levee » (ou « When the levee break... ») –
tiré du premier album – remanié ici pour le meilleur avec une
introduction et une outro gagnant en profondeur mais aussi ce morceau
d'ouverture sonnant le début de la transhumance : Brame monte le niveau
d'un cran sans forcer. Le groupe peint son décor à grand coup de
pinceau, étalant ses couleurs fauves et vous plongeant dans la campagne
profonde grâce à de nombreux samples et bruitages idéalement placés,
comme ces cloches sur « Monségur », ou encore par ces titres évocateurs
tels que celui cité précédemment ainsi que « Malebête » et « Araire ».
La musique vient compléter le tableau grâce à des touches blues redneck
à la française nettement plus présentes (« Malebête » en est un bel
exemple) – me renvoyant à Alexandre Hogue – mais aussi de petits éclats
blafards s'échappant de ces nappes sonores minimalistes et
acrimonieuses. La mélancolie vient vous cueillir durant la première
partie avec notamment ces riffs rêches et simplistes qui, couplés aux
ambiances brumeuses, collent petit à petit le bourdon. Alternant spoken
word blasé et chant hurlé au mégaphone, les vocaux de Serge plombent et
électrisent un peu plus l'atmosphère. Placés au second plan, ces
derniers confèrent un côté lointain comme si l'humain n'était finalement
que secondaire, un ornement passager.
La nuit, les charrues... montre une facette plus variée et organisée de
ce duo capable de vous transcender avec des sonorités de bric et de broc
portées à bout de bras. L'histoire contée par Brame défile sans accrocs,
corsant son jeu au gré des minutes par des sonorités plus hermétiques et
glacées : guitares grésillantes dévorant l'espace (« Araire ») ; boucles
répétitives (« The levee »). L'ambiance s'assombrit au gré des minutes,
à mesure que le côté tellurique prend le pas sur le reste. La tristesse
fait place au désespoir puis au malaise comme vous pouviez déjà
l'entendre sur Tenaille. Cependant le duo accentue le trait sur ce
second album grâce aux nombreuses touches noise et arrive ainsi à vous
tenir en haleine de bout en bout malgré la rudesse des sonorités. Le
mélange drone/noise/blues minimaliste de campagne française avait de
quoi interloquer et faire sourire sur papier pourtant tout s'éclaire une
fois le disque lancée avec notamment le long titre fleuve « Démolition »
clôturant parfaitement l’œuvre. Cette seconde partie aux allures
post-apocalyptiques vous rappelle d'ailleurs aux bons souvenirs des
vieux films S-F de l'Hexagone. Une bande-son idéale qui aurait très bien
pu servir de toile de fond à l'ovni Malevil.
Si Brame s'est forgé un univers unique et singulier sur son premier
album – piochant ses influences dans la scène américaine pour les
réinterpréter à sa sauce –, ce dernier le sublime avec La nuit, les
charrues.... Plus rigoureux, abouti et par la même plus accessible : les
superlatifs s'enchaînent pour qualifier ce second album. D'ailleurs les
amateurs/rices du genre ne s'y sont pas trompé(e)s, la formation
cumulant les succès d'estime depuis quelque temps. Un succès certes
plutôt confidentiel à la vue du style pratiqué et qui j'espère grandira
encore d'ici là. Un groupe fortement recommandé pour les fans de
musiques lentes, ternes, contemplatives et racées !
Dysthimie
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La Nuit, les Charrues... est moins indus que Tenaille ,
au sens ambient drone, au sens paysage en friche sonore, au sens bande
originale de rêves, du terme. La Nuit, les Charrues ...
est plus indus que Tenaille , au sens
empilade de morceaux en forme d'acharné et mécanique concassage et
aliénation des cerveaux. La Nuit, les Charrues ...
est toujours résolument indus, en tant que musique de la peine, de
l'homme de peine. Mieux que de la musique industrielle, cependant, La
Nuit, les Charrues ... est sa sœur la musique
agricole. Parce que comme de juste, Brame est toujours aussi fichûment
blues : douloureux, renâclant, lancinant, dur, habité par la foi autant
que la rancœur. Les étroits d'oreille continueront de trouver cela
répétitif et simplet ; ceux qui ont dans une région de la tête des
champs à perte de vue y trouveront musique à leur humeur, pour biner
encore et encore leur cerveau poussiéreux toute la brûlure du jour
durant. Parce que La Nuit, les Charrues... est
plus hardcore que précédemment, en ce que, non seulement Brame ne se
racontent pas à quel point ils sont blues, se caressant les barbes
qu'ils ne portent pas et vous racontant tous les infâmes bourbons qu'ils
n'ont pas bu, se contentant d'être aussi ruraux et bruts que peuvent
l'être ces deux aimables ours lunaires, mais encore ne prennent-ils même
pas la peine et le raccourci faux-ami de jouer américain, pour faire
encore plus court et direct : brut, a-t-on dit ? Brame œuvre à la
réhabilitation - et à l'appropriation, en passant - de l'épithète
"viscéral".
Bref : les deux vieilles carnes aboient encore comme des loups, et du
fond de leur grange avec leurs ustensiles bricolés au fond de la remise,
ou l'inverse, avec leurs scies et leurs masses, viennent vous rappeler
la saine joie de l'acharnement, et le blues.
Gulo Gulo
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BOUMBOUMM
http://boumboumm.blogspot.fr/2013_11_01_archive.html
Aah... voilà du bon blues! Ultra imprégné de crasse, de vieilles
industries qui puent la sueur, de dur labeur. Ici on crie la rage grise,
on est en France et comme partout c'est la putain de crise. Les temps
son durs, il nous faut du son qui reflète ces angoisses, ces questions.
Un cd à n'écouter qu'en tant de crise? Non évidement. Ça va bien plus
loin. C'est même très réfléchi. Posé. On aime. On aime pas. Toujours est
il que cet ovni musical est le pur blues de l'air 2000. Comme autre
fois, une musique par des jeunes, pour des jeunes qui en ont chié, qui
en chient, qui en chieront.. Non ils ne sont pas noirs...et alors ?...
écoute et tais-toi.
Lénaïc et Mathieu
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L'EMBOBINEUSE
http://www.lembobineuse.biz
Blues outillé faisant pénitence dans la boue....
Fouette moi avec un
bout de fer rouillé !
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DES CENDRES A LA CAVE
20 Juillet 2013
http://descendresalacave.blogspot.fr/
Un puissant système audio ne saurait embellir un son pareil. Là où
beaucoup tendent à aseptiser les déjections électriques de leurs
instruments, Brame n'en a
tout simplement rien à faire. De vieux écouteurs trouvés dans une
poubelle rongée par les années pourraient amplement suffir pour
optimiser son écoute. Des instruments fabriqués à la main, faits de
vieux débris trouvés ci et là, raccommodés au gros scotch, jonchés de
poussière et de résidus rocailleux en tout genre. Des amplis au bord de
l'implosion, des cordes qui frôlent la rupture. C'est ce qui frappe
d'emblée lorsque les premières «notes» entrent en jeu. C'est également
un amateurisme flagrant, fruit d'une musique qui semble pleinement
improvisée mais jamais réellement domptée, qui saute aux yeux. Tel un
équidé pris de folie, imprévisible, dangereux. Et pourtant. Une musique
de cow-boys aux traits lourds, pour qui les décennies passées au milieu
des étendues jaunâtres, arides et quasi-désertes ont fini d'user leur
corps. Un lieu insalubre, sorte de baraquement presque effondré, où murs
porteurs et poutres vacillent au moindre éternuement. Le sol craque,
grince même, sous la force des coups de pieds, en rythme. Nous plissons
les yeux, nous-mêmes, face à une telle violence infligée à nos oreilles.
Et pourtant.
Une figure qui ne tient pas à être appréciée, admirée, aigrie par ses
années de labeur au service d'une récolte dorée pour le moins ridicule.
Un vieux con pour qui les seuls centres d'intérêts se résument à
mâchouiller la paille et lâcher des glaviaux sur les seuls êtres égarés
près de sa propriété, alors que la pendule résonne, résonne, dans cet
habitat insalubre ( Malebête ). Il
s'agit là de blues-rock... à ce qu'il paraît. Et pourtant, nous avons
affaire à bien plus que ça. Car Brame n'en
a strictement rien à faire des étiquettes, écorchant ses instruments
avec nonchalance, transcendant les styles et leurs us et coutumes avec
autant de je-m'en-foutisme. Cette guitare saturée, omniprésente,
interpelle par son charisme, sa monumentale force de caractère, aussi
mal accordée et défraîchie soit-elle. Les cordes semblent flotter, se
percuter à chaque grattement de médiator. À la manière d'une voix rauque
, transformée à petit feu par un tabagisme intense, chaque vibration se
fait entendre. Les voix, parlons-en. Point de textes à proprement parler
ici. Des cris, étouffés mais bien palpables, habités. Habités d'un
terrible effroi, d'une certaine rage, d'une folie certaine. Les mots ne
se distinguent plus, seul le sentiment demeure. Un sentiment qui glace
le sang. Défiances en devient
assurément le summum, l'harmonica en toile de fond n'aidant pas plus à
nous rassurer. C'est ce même morceau qui vient alors scinder l'album en
deux, laissant place à des titres plus atmosphériques, notamment
parcourus de field recordings ( Démolitions ).
Brame signe ici un album très singulier,
mais qui excelle dans ses approximations. Un râle continu, quarante
minutes durant, mis en musique au travers des différents effets
adjoints. Les deux Français ne sont certes pas des musiciens hors pairs,
mais captivent leur auditoire, avec la plus grande indifférence. Car
dans ce brouhaha électrique cuit à point, tout semble fonctionner, sans
que l'on puisse foncièrement comprendre comment c'est possible. Mais le
fait est là, La nuit, les charrues... est
une tuerie. Difficile d'en dire plus.
Vivement recommandé.
Inoui
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K FUEL
Radio
Show sur Canal B / Podcast
12 septembre 2013
http://kfuel.org/radio/playlist12092013
Deuxième album pour
ce duo bordelais qui apprécie tout autant les musiques ambiantes et
industrielles que le blues le plus primitif. En résulte un disque malade
ou s'entremêle accords du Delta et succession de drones. Le ton est
singulier, âpre, répétitif et assez fascinant. De temps en temps, un
chant lointain écorne les différentes strates de guitares slide. A la
manière d'un Mendelson mais dans un autre registre musical, Brame en
impose par la personnalité affirmée de son univers musical. Pas de
prisonniers, tu aimes ou tu dégages. Du Royal Trux joué par SPK . Le
seul défaut de ce disque intense est sans doute la longueur des titres.
Brame s'écoute encore un peu trop jouer et semble se satisfaire de la
contemplation de son isolement musical. Un bain de noirceur.
GwenK
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TERRES ETRANGES
Musiques pour
jeux de rôle sombres
http://www.terresetranges.net/forums/viewtopic.php?pid=11201
19 Septembre 2013
Genre : post-americana, musique concrète
A écouter : le jour quand on s'emmerde, et
la nuit quand on a peur.
Pour jouer à : Millevaux, Dead Lands,
Mississipi, Apocalypse World
Comme au cinéma : Dead Man, The
Assassination of Jessie James, La Colline a des yeux
Saviez-vous qu'ils ont restauré l'église de fer de Crusnes ? Je trouve
ça scandaleux. Je me console en me disant que la musique de Brame n'en
finira jamais de rouiller.
Cette post-americana rurale est une écorce de cordes qui labourent la
nuit noire. On avait quitté Brame aux abords d'une gare désaffectée avec
Tenaille , on le retrouve plus recentré sur les guitares, rêches à s'en
faire saigner les doigts, des socs pourris tirés par des chevaux qui
n'en peuvent plus. Les field recordings sont moins présents, ou intégrés
aux cordes de façon organique, ces lichens qui se confondent avec leur
support. Ainsi, ce clic-cloc de pendule qui devient le bruit des outils
qui s'entrechoquent dans une grange, qui est finalement celui des
cordes. Tu ne sais pas où tu es, tu ne sais plus.
La nuit, les charrues est d'une texture hérissée, farouche. Un grand
petit album, à ranger tout près de la BO de Dead Man par
Neil Young, de Lashing The Rye d'Harvestman
et du drone sec et désertique de Earth. Plus humble et plus efficace
encore. Chaque corde est plaquée contre votre visage et vous lacère
comme un vieux barbelé rouillé.
Si ce son, râpeux, sailli de rares hurlements lointains, au mégaphone ou
un mouchoir sur la bouche, est une parfaite bande originale pour
Millevaux, il en sera de même pour toutes vos explorations désertiques,
rurales, forestières, western, vos descentes sous acide, dans des
profondeurs mal habitées.
Une nuit de longues introspections dangereuses entre deux fulgurants
assauts. Une nuit à courir pour échapper aux ogres des campagnes. Une
nuit à converser avec des frères morts-nés dans des granges situées dans
les limbes. Une nuit à attendre que la nuit passe, que le soc passe, que
la douleur passe. Une nuit à progresser aux phares dans un terreau de
ténèbres. Une nuit pleine d'une absence qui enterre tout. Une nuit à
fouiller le sol à la recherche de ses ongles, des ongles des morts, des
ongles des cordes. Une nuit à se pendre.
Thomas Munier
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GUTS OF DARKNESS
http://www.gutsofdarkness.com
(samedi 22 juin 2013)
Les seules choses que j'ai pu lire de Brame, je les tiens d'un ami les
connaissant lui-même de longue, qui les décrit comme une affaire
d'agriculture. Ce que j'ai entendu sur "La nuit, les Charrues", n'ayant
jamais écouté leur premier album, est d'abord une affaire d'horlogerie.
Tout le monde semble donc d'accord sur la nature profondément artisane
de Brame. Leur blues-rock est une grosse horloge, trônant, sinistre
masse de bois usé et de mécanismes rouillés, au fond de la salle à
manger d'une famille minière. Chez Brame, on a rien à prouver, rien à
donner en spectacle, rien à salir où à violenter avec calcul. On ne joue
pas le blues, le rock, l'indus, le noise, le hardcore,
ouate-seau-héveure. On les fabrique. On les épluche comme des patates
dans Germinal. C'est un travail. Un travail qui ne paie pas. Les
pincements de cordes sont totalement amateurs, familiers comme le pain.
Pesants, gouttes de plomb sur le moral ouvrier, ils tombent. Acharnés,
jusqu'au saturnisme de l'âme. Simple mais douloureux édifice sonore
dressé en plein boyau de la précarité rurale. Brame sont impavides comme
ces vieux ouvriers qui épluchent depuis longtemps, qui fouanent la
petite misère.
Non, on a pas envie de souhaiter un bon avenir à Brame (comme on le fait
pour les groupes du terroir dont nous autres fils de putes entendront
habituellement les démo cradingues avec un sourire en coin bienveillant
et quelque peu complaisant), tant la musique de Brame nous semble déjà
vieille, et usée comme le bois de l'horloge. Pour les affaires de
références me venant directement à l'esprit, au-delà de l'effet Swans de
leurs insistances, "La Nuit, Les Charrues" est souvent mené façon "Bone
Machine" bloquée sur ralenti-moteur, par ce hurlement emprisonné dans un
vieux transistor d'avant-guerre en guise de vaudou, bramant (...). Le
brame chez Brame est un outil, pas plus important que le reste. Il est
fiché là, simple clou dans nos aubarasses généreusement lardées. Brame,
pour enfin en finir avec toutes ces redondances - appropriées au sujet
cependant - est épais. Comme la corne sur ses mains. Et comme cette
corne, la grosse peau dure des travailleurs, Brame n'est ni malveillant
ni bienveillant. Juste corne, se contentant de brunir et d'épaissir au
fil des coups de pioche du quotidien. Brame est ainsi : un petit groupe
de bordelais de 2013 qui sont peut-être des campagnards du fond du
centre de la France en 1913, allez savoir... Un disque fabriqué par deux
gars, avec des outils, à conserver sous les débris de nos cartons comme
le daguerréotype anonyme d'une locomotive éventrée.
Raven
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CASBAH
RECORDS[ radio-webzine ]
http://casbah-records.com/radio-webzine/chroniques/brame
Maurice Agulhon, dans un texte introspectif publié en 1987, tentait de
classifier les communistes repentis, dont il était, en quatre
catégories. La première contenait les déçus, totalement dépolitisés, la
seconde ceux qui, considérant le communisme comme le Mal, ont fini par
militer à droite. Les membres de la troisième catégorie ont évolué vers
la social-démocratie, tandis que la quatrième catégorie concerne ceux
qui considèrent que le communisme n'est mauvais que depuis Staline et
qui s'accrochent au bolchévisme, ce sont les gauchistes. Quel lien avec
ce qui nous préoccupe ici, à savoir le rock sous presque toutes ses
formes ? Un jeu de l'esprit, ayant en tête que comparaison n'est pas
raison. Car quel est le Mal absolu pour le rocker de bon goût ? Le
metal. À ce seul mot, certain frémissent d'angoisse tandis que leur peau
se parsème de petits reliefs, c'est la chair de poule.
Jouons donc un peu. Transposons le metal en lieu et place du communisme
dans la classification de l'estimé historien décédé il y quelques jours.
La première catégorie concernerait alors ceux qui, vie active et
familiale aidant, ont troqué leurs t-shirts Guns'n'Roses pour une
chemisette Decathlon™ et sont devenus auditeurs de Rires et Chansons ou
de RMC. La seconde catégorie comprendrait ceux qui, lassés de la
présumée vulgarité du rock, se sont tournés vers quelque autre
anti-vulgate musicale tout autant stéréotypée (le rock indie 90's, par
exemple, dont les tenants originels vouaient un réel mépris aux
metalleux d'alors). Les gauchistes de catégorie 4 ont conservé leur
amour de la violence : noise, sludge, hardcore et compagnie. Enfin, ceux
qui m'intéressent ici, les tenants de la catégorie 3, qui ont
progressivement évolué, parfois en passant par 4, vers des formes plus
apaisées du rock tout en conservant la dynamique déviante et l'amour du
riff. Je confesse que c'est mon cas. Je confesse également que je ne me
situe pas toujours dans la catégorie 3, mais que je reviens
régulièrement à la case n°4. Ainsi, j'aime à m'écorcher les oreilles à
l'écoute de Brame. Le lien entre Maurice Agulhon et Brame n'est pas
évident, me direz-vous. Comme vous y allez ! Le premier est l'auteur de
"La République au village", les seconds, de "La Nuit, les Charrues..."
Il est donc question de ruralité, qui m'est chère. Quant au thème de la
sociabilité, il faut concéder une nette divergence. Car Brame n'offre
pas une musique sociable, c'est le moins que l'on puisse affirmer ! Il
s'agit davantage d'introspection, nécessairement solitaire.
Car "la nuit, les charrues" écorchent la surface de la terre en de
longues saignées parallèles et grasses, qui cicatriseront en
boursouflures bientôt estompées par l'action combinée de la pluie, du
gel et de la herse. Au petit matin, gris et pluvieux, des colonies de
corbeaux croassant viendront se repaître de la masse grouillante des
lombrics violemment extraits de leur abri chtonien par le travail des
lames d'acier froid.
"La nuit, les charrues..." font tinter les pierres calcaires parsemant
le sol, son résonnant tristement dans la vallée, porté des plateaux par
le vent d'ouest, celui qui apporte la grise douceur océane en même temps
que la pluie.
"La nuit, les charrues" balafrent le limon. Dans l'aube triste, les
nuances de vert et de jaune seront remplacées par le marronnasse à perte
de vue, troué de loin en loin par les taches gris bleuté des bosquets
dont les arbres dressent leurs branches nues, supplications résignées et
vaines au ciel anthracite.
"La nuit, les charrues", accompagnées du bourdonnement monotone du
tracteur, éventrent la glèbe dans un grincement sinistre, tâche éclairée
par les projecteurs qui trouent l'obscurité. L'homme, seul dans son
engin, ressasse ses angoisses dans cette dissection boueuse, les tourne
et retourne au fil du travail monotone,
Allers et retours,
Allers et retours,
Allers et retours constamment répétés.
C'est tout cela qu'illustre l'album de Brame. Un blues entaillé,
déchiré, lacéré, scarifié et glauque. Une noise lente, répétitive,
lugubre et rauque. Une musique hivernale qui fouit dans nos entrailles,
mettant au jour, ou plutôt à l'air, nos malaises et nos angoisses. Qui
nourrit les corbeaux de nos sombres pensées. Pour mieux les satisfaire,
afin que, repus, ils finissent par nous foutre la paix, qu'on puisse
apprécier la beauté d'un jour naissant et plein de promesses. Un
nécessaire contrepoint aux Growlers, en somme.
Finalement, "La nuit, les charrues.." font leur travail de charrues :
elles retournent le sol pour préparer le lent et patient travail de la
terre, gage d'une récolte abondante et nourricière quand reviendra l'été
paisible et ensoleillé.
Nicolas Gougnot
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HEAVY MENTAL
mercredi 7 août 2013
http://666rpm.blogspot.fr/
Je
me souviens de Tenaille ,
le précédent album de Brame, un disque qui m'avait pris par surprise
comme un chien enragé et un peu débile vous saute à la gorge ou vous
attrape par les couilles pour ne plus lâcher prise. Et ça fait mal. Les
deux BRAME (José
à la guitare baryton et aux grésillements divers et Serge à la voix, au
mégaphone et préposé à la marmite à chaux vive) sont de retour avec La
Nuit, Les Charrues… , un nouvel album tout aussi
auto-produit et encore une fois doté d'une illustration superbe et
emballé avec un luxe artisanal qui rendrait presque à l'objet CD tous
ses titres de noblesse. La musique de Brame n'a pas réellement changé
depuis Tenaille , on y retrouve
toujours ces bidouilles faites mains, ces percussions pédestres et
minimales, ces fields recordings parasitaires, cette guitare qui
cisaille allègrement les oreilles, cet harmonica maléfique et ce chant
de forçat qui vous hurle sa douleur dans la tête et tant pis si vous
êtes déjà sourd, Brame hurlera toujours plus fort. Ce qui a changé c'est
le resserrement, l'épaississement de la sauce si on veut : Brame, tout
en prenant son temps, le temps imposé par une moiteur intolérable,
semble se disperser un peu moins, ne plus jouer autant qu'auparavant sur
les longues distances… Mais ce n'est qu'une illusion, assurément encore
un mirage provoqué par la chaleur et la soif ; car on a bien sûr vérifié
et les sept titres de La Nuit, Les Charrues… ne
sont pas moins longs que ceux de Tenaille .
Ce qui change, c'est la façon de remplir ces espaces implacables, d'y
coller toute la dureté et toute l'âpreté dont on est capable pour faire
exploser la viande de l'intérieur, comme une charogne gonfle du bide
sous le soleil avant de faire gicler tout son pus dans les airs et
d'infester les alentours d'une odeur aussi pestilentielle que
persistante. Brame ne laisse donc pas trop le choix et ne fait pas de
cadeau, quitte à prendre le risque de devenir épuisant et la musique de
ce duo a beau être d'un minimalisme aride à faire pleurer et remuer les
cadavres enterrés depuis des années, elle prend également énormément de
place, bouffe le peu d'air respirable qui reste encore, étouffe toute
résistance et dessine sur nos peaux craquelées des signes annonciateurs
d'une mort certaine. Dead Man c'était
vraiment de la rigolade pour enfants.
* j'en ai d'ailleurs une de question : il y aurait un lien entre Brame
et Guimo – une chronique de l'album Lotophage à
lire ici – mais je n'ai toujours pas compris lequel…
Etagères : Chroniques
disques
Haz Modoff
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SLOW END
Juillet 2013
http://www.slowend.com/c/?d=1667
Avais-je dû à l'époque de Tenaille davantage deviner le blues que
l'entendre ? Difficile à dire, d'ici, une fois qu'on l'a entendu, une
fois qu'on les a vus le jouer, aussi...
En tous les cas, cette fois-ci, du moins là-dessus n'y a-t-il plus de
mystère, plus de doute ou de mirage : on le hume à plein poumon, ainsi
qu'une riche, puissante odeur de fumier. Normal, eh ! C'étaient déjà pas
des perdreaux de l'année, ils ont pas rajeuni entretemps. Et le blues
les obsède, ces hommes-là (hein ? encore une version du riff de Levee ?
vous voulez vraiment pas dégueuler du riff inédit par palettes entières,
comme tout le monde, plutôt ?) ; ou les habite ; ou les nourrit, plus
simplement, comme fait l'air, parce qu'il leur paraît aussi naturel et
sans phrases que pisser un coup. Mais néanmoins il leur rôde aussi dans
l'esprit, et ils le travaillent, sans fin, le besognent, à la chignole,
au fond de leur cagibi enfariné de sciure, avec la même application de
semi-ours que leur camarade Guimo là-bas dans la forêt voisine - car il
y a et d'évidence au moins autant de lui, de ses spectraux airs de
Daniel Darc remonté dans l'arbre, que d'Unsane, de Hems et de Godflesh
dans les longs et acharnés assauts que soutiennent les frères Brame
contre leur matériau de travail, au soc, à la bêche, au rabot, au
râteau, à la pioche - et durant lesquels point ne devez vous attendre
qu'ils fassent trop attention à l'identité exacte dudit matériau, terre
arable, morceau de charpente tombé, votre pauvre truffe, ou leurs
propres panards, qui leur arrachent des hurlements transis qu'ils
attribueront sans se démonter ni remarquer le sang, à l'effort qui
déchire les muscles exténués, signifiant par là qu'on est sur la bonne
voie, et qu'il faut continuer de s'échiner et s'échiner et s'esquinter,
jusqu'à ce que la nuit tombe, et que la bête aussi, enfin l'œil jaune
mi-clos sur la campagne et son inquiétant fourmillement nocturne, le
balancement du labeur s'attardant encore fantomatiquement dans les
membres engourdis par l'arrivée des rêves, le blues vissé au trognon, à
perpète.
La Nuit, les Charrues... en trois mots : fier,
inflammatoire, labourant
Gulo Gulo
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ROTATIONS VARIABLES
http://rotationsvariables.blogspot.fr/2015/11/brame-basses-terres-2015.html
9 novembre 2015
Ce doit être le
dérèglement climatique mais cette année le Brame se
fait plus tardif.
Cela fait même deux ans et demi que le dernier avait eu
lieu, La
nuit, les charrues ... j'en frissonne
encore.
Au programme la ruralité, les travaux des champs, les
bêtes sauvages, les friches et l'inconnu.
Alors que la rouille habitait La
nuit, les charrues ..., c'est la terre
lourde, sale et collante qui s'incruste dans les doigts
usés des travailleurs des Basses
terres qui est à l'honneur ici.
Une ambiance rustique/mystique à la Earth
en version française et originale (ce n'est pas du
plagiat, de la relecture, c'est une identité propre et
forte).
Tout d'abord déboule un étrange Sanglier,
à la fois furie primitive hurlante, dissonante et
également monstre mécanique imperturbable répétitif.
On se dit que les relents de blues du précédent album
sont oubliés et qu'une paradoxale musique industrielle
rurale se met en place. Fausse piste, Des (contres) feux sont
allumés, le blues revient en puissance, sale, déluré,
sexuel, hurlé, archaïque et lancinant avec une vrai
rythmique tellurique qui le martèle.
Arrive en cette terre hostile un étrangé,
calme comme un Paris Texas, mais le gars n'est pas du
genre à s'en laisser raconter et est prompt à sortir les
crocs et les riffs acérés, nul doute qu'il s'intègrera
dans cette communauté de culs terreux, c'est un des
leurs, il ne faut pas se fier à son aspect calme.
La Fourche, normalement
cet outil sert à retourner la terre, à mouvoir la paille
voire le fumier; celle-ci semble avoir des usages plus
belliqueux, primitifs et menaçants.
Les Friches, sorte de
pendant du Démolitions du
précédent album, sauf qu'ici on ne détruit pas on attend
que le temps fasse son œuvre, que le délitement se
passe, que la poussière s'insinue, que la corrosion
érode, que la pourriture s'installe.
Friche rurale ou urbaine, blues ou industriel ...
Nemo U Mulateru
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PARQUET SONORE
20 Octobre 2014
https://fr-fr.facebook.com/parquetsonore
Un concert de saison : les
hasards du calendrier font parfois les choses mieux
qu'on ne les aurait imaginées. En effet, rien de mieux
que la musique cinématographique et crépusculaire de
Brame pour rentrer pleinement dans l'atmosphère
automnale.
Ce duo bordelo-toulousain,
triture un blues noise farouche, brut, viscéral, qui
vous plonge directement dans l'ambiance d'un western
poisseux sous un ciel chargé.
Point de nylon ici, les
cordes de guitare sont des fils barbelés en plomb qui
s'entrechoquent sous le martèlement de mains cornées.
L'instrumentarium de bidouille (boucleurs, granulateurs,
graviers, cajon, appeaux, tamis, tôle, oscillateurs,
harmonica et mégaphone) enrobe le tout d'un épais
brouillard qui do nne
les frissons, et les râles déchirants qui viennent s'y
superposer finissent de vous glacer le sang.
Pourtant rien est figé, ça
saigne, le bois est usé, griffé, les pierres s’effritent
sous vos pas, le parquet grince et menace de s'évanouir
en poussière à chaque vibration.
Amis vous êtes prévenus,
chaussez vos bottes et tendez bien l'oreille, ces deux
là savent comment vous les réchauffer.
Univers musicaux associés :
One Lick Less, BO Dead Man,
L'Ocelle Mare, Swans, Radikal Satan...
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ROTATIONS VARIABLES
14
Octobre 2013
http:// rotationsvariables.blogspot.fr
Brame est-il un groupe de blues ou fait-il
dans l'industriel, voire est-il au delà de ça ? Difficile de trancher.
Il y a indéniablement une trame blues, cette guitare, mais nimbée d'une
lumière industrielle,
la couleur sonore qui entoure cette guitare; c'est dire le coté joyeux
des lascars.
Donc une guitare poisseuse, rêche, couverte de boue séchée, incrustée de
rouille, acerbe et affutée.
Accompagnée de tapements réguliers et diffus (sur et avec tout ce qui
passe sous la main ou le pied), les qualifier de rythme serait
péremptoire, mais cela fait office de.
Divers bruits inquiétants, dissonants et incongrus viennent se
greffer à ce substrat (cailloux, appeaux, tamis, tôles ... dixit le
groupe).
Ne manque que le chant, enfin le hurlement lointain - inintelligible,
inarticulé, outrancier - effectué au travers d'un mégaphone.
En conclusion il s'agit bien d'un blues décharné, plus que désespéré,
agrémenté d'une couche de crasse industrielle, elle même bardée de
drones arides.
Un blues pour lequel le diable en personne vendrait son âme le soir à un
croisement de routes, à moins qu'il n'ait trop peur !
U
Mulateru
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SATAN
OWES US MONEY
REPORT
Brame +Menuet Babel,
25 février 2012, Up&Down, Montpellier
http://satanowesusmoney.blogspot.com/
Brame : le groupe qui donnerait presque envie
de dire que Gira et son My Father Will Guide Tout Ça Tout Ça arrivent
après la guerre, qu'il laisse un peu son taf à Nick Cave ce sale
gothique, que Faulkner en secret était français, ce genre de folles
conneries enthousiastes ; le groupe qui donnerait presque envie de dire
qu'ils jouent un peu tout le temps le même morceau, qu'ils ont une seule
idée, ce genre de conneries (ne vous cachez pas, je sais que certains
l'ont pensé) ; si ce n'est que chaque morceau, chaque pulsation provoque
dans le bassin et les vertèbres des réactions différentes, eux qui sont
plus intelligents que nos pauvres cerveaux mesquins ; Brame, qui tire
toute la transe qu'il y a au blues, en en pressurant le riff primordial
sous toutes ses mornes et irrésistibles inflexions venues du ventre, qui
en fait de l'indus et le joue comme du hardcore ; le groupe qui s'ajoute
à la croissante liste de ceux qui me rendraient chauvin malgré que j'en
ai, avec cette façon de s'approprier le folklore qui n'appartient qu'à
nos punks à nous.
Gulo, 26/02/2012
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Le Château des
Musiques Sombres
(2012)
Un recueil de critique musicale qui prend pour angle l'usage
scénographique de la musique en jeu de rôle.
http://ubuntuone.com/4MfpzOdjiPP4ypO4fe1IpZ
BRAME / Tenaille / 2009
Genre : post americana / field recordings
A écouter : la tête en friche industrielle
Idéal pour : Warsaw, Deadlands, Summerland
Comme au cinéma : Les Rivières Pourpres 2, La Raison du Plus Faible
Autopsie : Pour mon retour de vacances, nous allons plonger dans un
contrée qui n'évoque justement pas les vacances : la Lorraine, et ses
friches industrielles, ses gares abandonnées, et les derniers habitants
qui côtoient ce désert de l'emploi. Les églises en fer rouillé, la Ligne
Maginot, et les rails de chemin de fer, et les wagons tagués. C'est ce
paysage là que nous offre la musique de Brame, un two-man band français
tout ce qu'il y a de plus confidentiel. Si les field recordings (chants
d'oiseau, sons du train, vent dans les ruines) créent cette évidence, la
musique quant à elle lorgne vers l'americana, et impose un parallèle
audacieux : les friches industrielles de la Lorraine, c'est un western
contemporain. Un western fait de misère rurale, de familles déshéritées,
de rouille, et de futur sans avenir. Mais c'est une americana mutante;
c'est une Lorraine digne de "La Colline a des yeux" : instrumentaux
déglingués, chant réduit à un vagissement crépusculaire... L'ensemble
évoque l'art brut, rappelle que le nuage de Tchernobyl ne s'est pas
arrêté à la frontière, et a dans les yeux le bleu qui manque à son
décor. Et finalement, comme un accident, c'est une beauté, une
nostalgie, qui évoque les œuvres des photographes qui font de
l'exploration urbaine : les ruines ont une âme, elles ont quelque chose
à dire, et un décor de désolation en vaut bien un autre.
En attendant, c'est à la fois la bande son idéale pour un western
crépusculaire dans les mines du Klondike, une errance dans les rues
mortes de Warsaw hantées par le fantôme de Sergio Leone, ou tout
simplement un polar de l'est gorgé au schnaps et au chamanisme.
Et comme c'est en téléchargement libre sur le site du groupe, ça ne vous
coûtera rien de tenter le tourisme de l'oubli.
Thomas Munier
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SATAN OWES US MONEY
mardi 3
novembre 2009
http://satanowesusmoney.blogspot.com/
Si jamais l'envie t'en prend d'en parler, n'oublie pas qu'on a pas
seulement ton adresse, mais aussi un tournevis et un marteau, et José,
avec un tournevis, c'est pas un manchot ...
Je cite de mémoire.
Mais c'est pas tant José qui m'inquiète. Plutôt tous ses potes
traîne-la-patte sur ce chantier fantôme, dans l'aube du Far-West, qui
revient à la vie avec langueur et tâtonnement, avec ce brame puissant
qui peu à peu gagne en majesté, en envergure, en netteté menaçante. On
s'affaire pesamment mais sûrement, invisibles dans ces vents rôdeurs,
c'est une certitude, on forge et on rémoule des mâchoires irrégulières
et de larges massicots, on s'étire en craquant péniblement d'un long
sommeil poussiéreux dispersé par un l'estomac douloureusement creusé ;
on hurle un tourment famélique, de loups restés égarés quelque part dans
le temps, dans un souffle qui se perd dans le souffle vermoulu des
machines et celui furtif de la nature paisible.
Passe le fracas d'un train, et le rêve maussade se dissipe, à regret,
retourne au lointain ...
Voilà, les gars ; je vous avais dit la possibilité que je vous pile ou
zappe ; j'avais omis celle où je chroniquerais votre machin sur la
première écoute, s'il me saisissait d'une vision. Faut dire aussi que
cette saloperie m'a mâchouillé le cerveau matin, sans prévenir ...
Libellés : four
roses
gulo gulo
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Les Potagers Natures / Növö Local
programme / mai 2010
http://www.lespotagersnatures.org
BRAME est un duo à la musique sèche et aride.
La voix émerge d'accords tranchants de guitare électrique rappelant le
jeu d'Albini dans Shellac ; le rythme de la percussion est quasi
inexistante.
L'ambiance est au deuil, au recueillement, à l'introspection.
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ALL THAT GLITTERS / SOUM / UP&DOWN
(promo concert Montpellier)
Brame, comme son nom l'indique, c'est le chant du blues rendu à l'état
de nature, c'est un lambeau de chemin de fer qui vous emmènera vous
perdre dans vos rêves forestiers les plus rugueux, Brame c'est bon comme
un bon scotch bu dans le fond de votre godillot.
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HEAVY MENTAL
mardi 2 mars 2010
http://666rpm.blogspot.com/
Encore une bonne surprise. Brame nous
vient tout droit de Bordeaux, une ville qui abrite donc
d'autres espèces d'animaux sauvages que l'ours velu, le
turbokinder et le post hardcoreux septentrional. Ce Tenaille est
(peut être) le premier album d'un groupe qui sait
soigner son esthétique générale (superbe artwork) et une
certaine opacité d'ensemble – ce que d'aucun appellerait
de la prétention arty ou de l'obscurantisme d'intellos.
Mais le charme opère à plein quand même, dès le départ,
et haut la main.
Le disque attaque en douce avec un Dépouille presque
lymphatique, lent et semble t-il sans fin, traversé par
des déchirements d'harmonica, des grésillements de
guitare, une grosse caisse qui soudain bat le rythme
cardiaque et un vague paysage sonore – on croirait
entendre un train ou autres bruits ferroviaires au
début. Encore un groupe qui nous fait le coup du western
urbain avec le cow-boy des temps modernes perdu dans
l'immensité industrielle et la modernité décadente ? Je
n'ose le croire. Les membres du groupe s'appelle tous
Brame, concept éculé depuis au moins les Ramones et peut
être même avant (les Daltons ?) et ils sont également
affublés de prénoms ridiculement vieillots : José joue
de la guitare, du looper et de la grosse caisse, Serge
braille, joue de l'harmonica et de la machine à bruits
(mais où est donc passé Averell ?). Maurice –
l'impresario des deux autres à moins qu'il ne soit leur
père – répondra quant à lui à toutes vos questions et
commandes éventuelles d'un album que Brame offre par
ailleurs en téléchargement
libre sur son site officiel, vive la
révolution et tant pis pour le loyer.
Un nouveau western, du blues déchiré pour ne pas dire
déchiqueté, du souffle court à la limite de l'agonie,
des vagissements de soulard coincé sous une vieille
caisse de bouteilles de bourbon périmé, une guitare qui
sonne la plupart du temps comme une pauvre plaque de
métal rouillé attaquée à la tronçonneuse, des samples
trop faciles d'une ville c'est beau la nuit, des textes
(?) incompréhensibles (re ?), plus aucun indien digne de
ce nom à massacrer à l'horizon, pas de chasseur de
primes ou de shérif pour vous faire peur, pas de putes
de saloon non plus : le paysage décrit par Brame –
tellement bien délimité qu'il peut s'étendre à perte de
vue – est aride et désolé mais finalement absolument pas
vide ni stérile et cette musique, pour autant simple et
décharnée qu'elle apparait, possède un fort côté
piégeux, un peu comme ce vieux puits à moitié effondré,
espéré depuis de longues heures de marche sous un soleil
impitoyable et dont on prie pour qu'il ne renferme pas
que de l'eau croupie ou daubée par un cadavre décomposé
et abandonné là par une bande d'apaches cloutés. Ça,
c'est le genre de conneries que j'aime inventer bien que
je sente pertinemment qu'il n'y a aucune imagerie aussi
simpliste (Brame a beau venir de Bordeaux, le Ouest
terne et eux ça fait deux) ni aucun concept fumant
derrière tout ça, aucun calcul ni préméditation
prétentieuse. Pas d'arrière pensée si ce n'est celle de
jouer une musique un peu différente de la moyenne
underground mondiale, position que l'on ne saurait taxer
d'ambitieuse : c'est sans doute avec des moyens limités
et insuffisants que Brame a essayé de faire quelque
chose et y est parvenu – à l'instinct, à la force du
poignet, sous l'emprise d'un bon alcool ou je ne sais
trop comment. Le résultat est à la hauteur de leur
ignorance désormais vaincue comme de la mienne,
puisqu'il est synonyme de (bonne) découverte. Et c'est
ça le plus important.
Etagères : Chroniques
disques
Haz
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SLOW END
Novembre 2009
http://www.slowend.com/c/?d=812
Brame ébranle son croulis de rouille d'usine
comme l'on turbinait dans les champs de coton : languissamment, accablé
à en saigner sous le soleil qui monte à n'en plus finir dans l'aube ; au
rythme des tambour des galères, car la musique d'esclave est la même
sous toutes les latitudes, qu'on l'appelle dub de la peau parfaite ou
chant du Delta, c'est le même harassement, le même gémissement, le même
acharnement qui brouille la vue, le même ... brame, tout à fait, qui
ferait une bonne traduction de chez nous pour pour "howl".
C'est majestueux, capiteux, beau comme ... vous avez deviné quoi.
-gulo gulo ,
Tenaille en
trois mots : terrien, spirituel, douloureux
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